Une lueur de Sagan. Un trait de Duras. En tête, l'icône Anna Karina. L'univers de Louise Verneuil s'amarre à ces figures inspirantes, à d'autres encore, de Saint Germain des Près, de la Rue de Verneuil, de sa famille. Ses chansons de femme de tête, ses chansons entêtantes, sont rassemblées dans son premier EP, précédant un album baptisé Lumière noire, annoncé pour 2020. Ombre et lumière, deuil et espoir, lumière et bleu noir. C’est la vie Louise. L'occasion de le soumettre à l'interview Roulette Ruse. Une appli Roulette, des numéros tirés en aléatoire, chacun correspondant à une question.
12. Comment naît l'inspiration ?
J'utilise des instruments de musique anciens, une machine à écrire, des carnets... Je réalise mes clips avec une caméra Super 8 Beaulieu, qui ne me quitte pas durent mes voyages. Cela me renvoie à mon enfance, à mon adolescence : j'ai grandi dans un univers vintage, ma mère adorait les fripes, les brocantes, les tissus, les falbalas, les vieux cadres... J'ai surtout besoin de solitude et d'éloigner les tentations pour faire de la musique: pas de smartphone à portée de main, ni de chocolat ou de fromage, je suis très gourmande...
1. Qui pour un duo? Pour un dîner ?
Anna Karina, je ressens en moi sa liberté. Je la cite beaucoup sur mon compte Instagram. J'aime la légèreté et la profondeur dark du cinéma de la fin des sixties, du début des seventies. Mon album s'appellera d'ailleurs Lumière Noire. Pour décrire les arrangements à Samy Osta, je lui parlais souvent de film, par exemple la fin de Pierrot le fou.
28. Les disques écoutés à la maison, petite ?
Ma mère passait les 33 tours de Jean Ferrat, Serge Reggiani, Barbara, Gilbert Bécaud. Elle chantait Serge Gainsbourg dans la cuisine. J'ai failli m'appeler Elisa, et Verneuil est un clin d'oeil évident. Cela l'a fait rire. Mon père écoutait Elvis Presley, Johnny Cash, Bob Dylan, Les Beatles. Il était pharmacien, et guitariste: j'ai appris en le regardant jouer. Les repas de famille se terminait souvent en chanson, ma famille est d'origine méditerranéenne, pied-noir, corse, catalane... et moi je suis très extravertie dès qu'il s'agit de chanter.
23. Qu'avez-vous fait de vos 20 ans?
Après des études de journalisme, à Nice, j'ai suivi un garçon par amour en République Dominicaine et je suis revenue en France, par manque d'amour. J'ai été attachée de presse par hasard dans le milieu de l'art contemporain, hôtesse, serveuse. La musique était enfouie en moi, et puis je me suis retrouvée à The Voice. Cela a affirmé mon désir. Louis Bertignac m'a composé des musiques, Carla Bruni m'a écrit de beaux textes, mais ce n'était pas moi.
24. De quoi parlent vos chansons?
D'amour. Nicotine évoque une relation avec un pervers narcissique qui n'a duré que deux mois mais m'a profondément marquée. (Lire ici) Le Beau monde est venu après une rupture. 60 personnes étaient venues à mon anniversaire. Quatre mois plus tard, quand j'ai quitté mon ami, les mêmes qui me fêtaient m'ont tourné le dos, j'étais devenue: "celle qui est partie". Dans mon prochain morceau, Love Corail, qui parle d'amour, bien sûr, je mets en avant cette plante marine, la seule dont on ne cicatrise jamais vraiment.
7. Quels posters dans votre chambre d'adolescente?
Les Spice Girls. Puis Nirvana. Et ensuite, des affiches de films de Godard. En Corse mon oncle avait une collection de cassettes vidéos enregistrées à la télé, et il achetait les jaquettes dans un magazine. J'ai d'abord rêvé sur ces images, puis j'ai vu les films, j'avais l'impression d'être dans la vie. On trouve dans certains de mes clips des références à Peau d'âne, de Jacques Demy, ou à La Belle et la bête, de Jean Cocteau.
32. Vos héroïnes du quotidien ?
Ma mère est mon modèle. Je l'ai perdue l'an passé. Ma grand-mère. Mon arrière grand-mère, Emerencia, à qui j'ai dédiée une chanson. Elle m'a appris à ne pas m'effacer devant les hommes. J'ai enregistré Emerencia, son poncho sur mes épaules. Je porte en moi ces femmes courageuses, avant-gardistes, terriennes, mystiques, toutes un peu sorcières, et qui toutes s'appelaient Louise, Marie-Louise, Lucia. D'où mon prénom d'artiste. Louise Verneuil est un avatar que j'ai choisi en arrivant à Paris, à 22 ans.
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