C'est un homme de paroles. Younès Boucif a fait jongler les mots dans Drôle, la série de Netflix sur le stand-up. Une auto-fiction est en écriture tandis qu'il publie son premier album, Identité remarquable, signée Younès tout court, le rap aux lèvres et les textes intimes au coeur. A 27 ans, rien n'arrête l'artiste aux identités multiples, toutes tendues vers le plaisir des mots. C'est d'ailleurs sous la direction d'une autrice, Alice Zenitzer, que Youcef Boucif a tourné Avant l'effondrement, coréalisé avec Benoît Volnais. Et il vient de jouer un écrivain dans Lonely Planet, une comédie romantique de Susannah Grant, tournée au Maroc pour Netflix au côté de Laura Dern et Liam Hemsworth. L'occasion de le soumettre à l’interview Roulette Ruse. Une appli, des numéros tirés en aléatoire, chacun correspondant à une question.
31. Artiste, hasard ou vocation?
En CM1, un prof de théâtre m'a fait jouer Le Petit Poucet, cette expérience a déclenché mon plaisir du jeu. J’ai d'abord suivi des cours de théâtre au Centre culturel de Mont- Saint-Aignan puis à partir de la 3ème, ceux du Conservatoire de Rouen. Je me sentais bien sur scène. La vocation de la musique a été moins évidente. J’ai pris des cours de guitare de 5 à 11 ans mais je n’étais pas très motivé. Je me suis mis au rap car mon grand frère en écoutait, j'aimais les disques de Booba, Medine, Keny Arkana ou Psy4 de la rime pour les paroles, et j'ai commencé à écrire des textes. J'ai mené de front la comédie et la musique mais la série Drôle m'a davantage fait connaître que le rap.
19. Un guide, un modèle ?
Rilès, rencontré en classe de seconde, il était autodidacte et m’impressionnait car son plan de carrière était élaboré et il faisait tout pour le réaliser. Je n’ai jamais vu une telle détermination. RIlès m’a entraîné dans son sillon et montré que tout était possible. Lui, mon ex-amoureuse et Paris où je suis arrivé l’année de mon master, m’ont donné la force de prendre la décision d’être artiste afin de ne pas regretter à 35 ans, d’être juriste au lieu qu'acteur ou rappeur. Un job de surveillant m'a permis d' être indépendant financièrement et je me suis lancé.
2. Une chanson que chantait votre grand-père, votre grand-mère ?
Mon grand-père était luthier à Oujda. Je me souviens de toutes ses guitares alignée. J'ai dédié Mima, à ma grand-mère, le texte évoque notre difficulté à communiquer au-delà de la tendresse car je n'ai pas assez de vocabulaire en arabe pour échanger avec elle.
3. Les chanteurs qu'écoutaient vos parents ?
Oum Kalthoum, Jean Ferrat, Barbara, Cheb Khaled… on les écoutait surtout dans l’Espace sur la route des vacances qui nous menait à Oujda voir mes grands-parents.
18. Où écrivez-vous ?
J’écris en mouvement, en faisant la vaisselle, à vélo, en marchant… C’est le fruit de réflexion et de conversation. Par exemple Harraga est né d'une discussion avec mon cousin Tarik, qui vit en Algérie, il ma raconté l’histoire de trois jeunes du quartier d'Arzew disparus en mer en 2011.
29. La chanson parfaite selon vous?
Chira ly nabghiha, de Cheb Hasni, cela veut dire « la femme que j’aime ». Son grain de voix m’a touché avant même de comprendre les paroles
14. Des posters dans votre chambre d’adolescent?
Peu, et ils n’étaient pas significatifs de mes goûts, par exemple j’avais affiché un poster de Breaking bad, que l'on m’avait offert. En revanche, j’avais collé sur les murs une centaine de feuilles où étaient inscrit des mots, des phrases, et je puisais dedans quand j’écrivais des chansons.
36. Qu’avez-vous fait avec votre premier cachet?
Je me suis offert un bon restau, j'imagine, car j'ai longtemps frustré de me pouvoir m'en offrir. J’adore la bonne cuisine, j'ai déjà essayé trois restaus étoiles.
8. Vos projets?
Mon master en création littéraire m'a permis d'élaborer une ébauche de livre, une auto-fiction.Je viens de tourner dans Cosmetic Valley, je joue un ouvrier embarqué dans le braquage d'une usine de parfum. J'aimerais aussi réaliser, à moyen terme, quelque chose à la manière de Fleabag. Et avec mon grand frère Abdil, qui a 9 ans de plus que moi et est prof d'EPS, on manage Tif, pour qui j'ai eu un gros coup de coeur en le découvrant sur internet.
Identité remarquable. Bélem/Wagram
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